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Télé 7 jours N°2622 du 28 août au 3 septembre 2010
Jean Dujardin
Nous surprend encore
Cinéma. A l’affiche le 25 août, le nouveau film de Bertrand Blier, « Le Bruit des glaçons », est une fable tragi-comique et iconoclaste autour du cancer. Jean Dujardin confirme, une fois de plus, qu’il sait conjuguer le verbe jouer à tous les modes.
Jouer pour Bertrand Blier faisait partie de vos rêves d’acteur ?
Je ne m’autorisais même pas à y penser. C’est ce qui me plaît dans ce métier. Quel bonheur quand ce genre de proposition vous tombe dessus ! Pour moi, Blier faisait partie des réalisateurs que je regardais très jeune, avec des films comme « Les valseuses » ou « Buffet froid ». Quand on s’est rencontrés, il avait quelque chose dévident, une communauté d’esprit.
Qu’est-ce qui vous plaît dans son cinéma ?
Sa liberté, son arrogance, ses personnages masculins crétins, ses femmes admirables qui les portent. Il a quand même mis un sacré coup de pied dans la fourmilière du cinéma des années 70. J’ai l’impression qu’il continue, vu l’offre actuelle aseptisée et très codifiée qu’on nous propose pour plaire à la célèbre « ménagère ». Blier poursuit son chemin, ne transige pas et se réinvente dans sans perdre ni sa fraîcheur, ni son insolence. Cela m’enchante.
Pourquoi vous a-t-il choisi ? Serait-il fan des personnages de Brice ou de OSS 117 que vous avez incarnés ?
Bertrand n’est pas un grand bavard. Son père (Bernard Blier) était un acteur populaire français je suis un acteur populaire français, il doit aimer ça. Je pense qu’il doit apprécier aussi mon travail, mais il n’a pas besoin de le dire. Il est très pudique, et c’est une qualité très agréable. Je crois qu’il avait envie de me « noircir » un peu, d’aller chercher autre chose. Et, sans doute, il savait que j’étais prêt à le lui donner.
A l’époque de « Lucky Luke », vous étiez déjà très désireux de faire le prochain film de Blier, dont le montage financier n’était pas encore bouclé. Que votre notoriété soit décisive pour l’autre des « Valseuses », ça vous inspire quoi ?
Ca me désole. Mais, vu qu’on dit que je suis un acteur « bankable », si cela aide à monter ce genre de film, tant mieux !
Etes-vous conscient que vos fans risquent d’être déboussolés par ce film souvent déconcertant qui rompt à votre image grand public ?
A chaque fois, ils se sont montrés, très bienveillants. Si je leur donnais toujours la même chose, ils m’en voudraient. Je crois en l’intelligence du public. J’essaie de tout jouer comme l faisaient les anciens. J’ai besoin de changements, sinon le cinéma va devenir très ennuyeux !
Le cancer et la mort sont au cœur du film : êtes-vous angoissé ?
Je suis plutôt fataliste, mais avoir ces questions présentes à l’esprit permet de garder les pieds sur terre. Je sais que tout peut s’arrêter. Même si je suis quelqu’un d’enjoué, comme tout le monde, je vis avec. Cette maladie est cruellement populaire, on a tous des proches qui sont touchés. J’ai perdu deux amis de 35 ans. Sur le tournage, je n’y pensais pas. Blier est plus fort que les thèmes qu’il aborde. Son film parle de combat, d’espoir et d’amour triomphant.
Avant d’apprendre qu’il est rongé par un cancer, votre personnage se noie dans la dépression et l’alcool. Perdre pied, cela vous fait-il peur ?
En cas de coup de mou, j’ai tendance à me botter le cul très rapidement. Le poète maudit, ce n’est pas mon truc ! Je suis un optimiste fataliste. Le sens du décalage, l’autodérision et l’humour peuvent vous sauver de beaucoup de choses.
INFO + :
Un film muet, en noir et blanc, c’est le dernier pari de Jean Dujardin. The Artist est le nouveau film de Michel Hazanavicius, réalisateur des OSS117. Le tournage débutera en septembre, à Los Angeles. Alexandra Lamy travaille à l’écriture de son premier film « Le Camisard », avec, dans le rôle principal, un certain… Jean Dujardin, son mari.
Interview Julien Barcilon
